Le géant Google a dévoilé un nouveau système de messagerie, dénommé Chat, dans un élan technologique visant à :

  • remplacer qualitativement le SMS,
  • unifier les différents services de messagerie d’Android,
  • fournir une solide alternative aux applications iMessage d’Apple et WhatsApp de Facebook.

Pour arriver à cette fin, cette nouvelle messagerie aura besoin de l’aide et de l’adhésion des opérateurs de téléphonie mobile.

Google Chat, successeur du SMS

Contrairement aux textos traditionnels, ou SMS, la plupart des services de messagerie modernes, tels que Signal, WhatsApp, Facebook Messenger ou iMessage d’Apple, sont des services OTT (over-the-top) qui contournent l’opérateur de téléphonie mobile en envoyant des messages sur Internet.

Google Chat est différent. Les utilisateurs n’auront pas besoin de télécharger une autre application de chat ou créer un nouveau compte. Au lieu d’utiliser la technologie OTT, il est basé sur les services de communication riches (RCS), un successeur du SMS (standard de message court), utilisé par des personnes partout dans le monde depuis 1992 et qui reste la solution de repli pour la plupart des utilisateurs.

Google Chat, un service qui fonctionnera sur tous les téléphones et chez tous les opérateurs

Le RCS est en cours de développement depuis 2007, sous la direction de l’organe de négociation des opérateurs mobiles de la GSMA. Différents opérateurs de téléphonie mobile ont proposé leurs propres versions, généralement appelées «messagerie avancée» ou similaire, mais ils n’ont généralement pas travaillé avec le monde extérieur.

Avec Chat, Google unifie toutes les versions disparates de RCS sous un standard interopérable qui fonctionnera sur tous les réseaux, les smartphones et les systèmes d’exploitation. Ce faisant, le géant américain espère profiter du caractère infaillible des SMS : tout le monde peut envoyer un message à quelqu’un d’autre avec un téléphone sans avoir besoin d’un compte ou d’une application spécifique. Google veut mettre le SMS à jour avec toutes les fonctionnalités du chat moderne.

« La GSMA travaille depuis près d’une décennie pour encourager l’adoption de RCS afin de concurrencer les applications de messagerie instantanée tierces, mais l’adoption au fil des ans a été inégale », a déclaré Raghu Gopal de CCS Insight. Si Google est en mesure de positionner son client RCS comme un client véritablement universel et utilisable sur les appareils Android dans le monde, il peut offrir un moyen de réduire l’emprise de Facebook sur les services de messagerie.

Un pari loin d’être gagné

Cependant, Google et les opérateurs doivent se rendre compte que leur entrée dans le jeu est un peu tardive, et il qu’il faudra quelque chose de spécial pour établir le RCS en tant que norme mondiale.

Pour les opérateurs de téléphonie mobile, cette offre est la dernière chance pour ne pas se transformer en simples tuyaux de données fournissant l’accès à Internet par lequel les autres offrent les services demandés par les utilisateurs, que ce soit la voix, la vidéo ou le texte.

Les utilisateurs, eux, verront leur expérience améliorée avec le RCS une fois que leur opérateur téléphonique aura activé la compatibilité.

Selon Kester Mann, analyste pour CCS Insight, le fait d’inciter les gens à utiliser Chat sera certainement une « question difficile ». L’espace de la messagerie est un marché difficile à cerner, mais si le soutien de Google, de la GSMA et des principaux opérateurs n’est pas suffisant pour lui donner une chance, alors le RCS risque de ne jamais prendre son envol.

Une bataille qui fait rage

Tout comme WhatsApp et Facebook Messenger, iMessage permet aux utilisateurs d’envoyer des textes, documents, photos, vidéos, informations de contact et messages de groupe via Wifi ou d’autres formes d’accès Internet. Il offre ainsi une alternative aux SMS et aux MMS pour la plupart des utilisateurs disposant de périphériques exécutant iOS 5 ou une version ultérieure. Ces applications ont relégué le SMS au rang de fossile et Google a tenté de s’incruster dans cette nouvelle niche.

Google Voice, Google Hangouts, Google Allo, les efforts précédents de Google pour concurrencer l’application iMessage d’Apple se sont toutes soldés par de cuisants échecs. Ces tentatives ont eu un très faible écho et la plupart des utilisateurs ont trouvé que les solutions étaient trop maladroites. Ils n’ont pas voulu changer leur mode de communication actuel, car les alternatives offraient de meilleures expériences et beaucoup plus de fonctionnalités. Google Allo et Google Duo sont loin d’avoir atteint des milliards d’utilisateurs comme Facebook a à travers ses applications WhatsApp et Messenger.

Un changement de stratégie

Les échecs répétés du géant américain dans sa tentative de grappiller des parts de marché dans la course aux applications de messagerie l’ont amené à repenser entièrement sa stratégie. Au lieu de lancer une application, Google a décidé de faire évoluer le SMS lui-même. La firme de Mountain View, s’est, pour cela, allié avec les opérateurs de téléphonie mobile du monde entier.

Ces derniers ont tout à gagner dans cette alliance, car les applications de messagerie comme WhatsApp leur font perdre chaque année des milliards de dollars. Les utilisateurs se contentent désormais d’acheter des forfaits Internet, car ils peuvent envoyer des messages et passer des appels en utilisant des clients de messagerie.

La stratégie est un peu risqué, car le SMS est-lui-même mourant et Google Chat ne propose aucune fonctionnalité révolutionnaire. Toutefois, les chances de succès ne sont pas nulles, car aucune des applications qui ont échoué n’avait eu l’appui des opérateurs téléphoniques ou n’avait été orientée autour d’un système que des millions de personnes utilisent déjà.

La sécurité constitue, cependant, le talon d’Achille de Google Chat. Contrairement à la plupart des meilleurs services de messagerie, RCS, et par extension Google Chat, n’est pas et ne sera pas crypté. En dépit d’être envoyé sur Internet, il sera porté par les opérateurs de téléphonie mobile et donc soumis à toutes les règles traditionnelles de surveillance des communications.